La pression monte pour que Richard Stallman (RMS), qui est de retour au sein de la Free Software Foundation (FSF), puisse être éjecté de l'organisation qu'il a créée et dont il a été le symbole depuis des décennies. En effet, après la réaction de l'Open Source Initiative (OSI), des centaines de partisans du logiciel libre ont signé une lettre ouverte pour demander au fondateur du mouvement du Libre de rendre son tablier, mais aussi à l'ensemble du conseil d'administration de la FSF de démissionner.
La Free Software Foundation est une organisation à but non lucratif fondée par Richard Stallman en 1985 avec pour mission de faire la promotion du logiciel libre. Depuis lors, le Chief GNUisance a assuré la présidence de la FSF en plus d'être membre du conseil d'administration, jusqu'à ce qu'il soit contraint de démissionner en 2019. Conséquence de la position qu'il a prise dans l'affaire Epstein qui fait allusion à des agressions sexuelles sur mineures. Cette année-là, Richard Stallman s'était prononcé sur le cas de Marvin Minsky, un expert en IA du MIT avec lequel il semblait avoir des liens d'amitié. Marvin Minsky était accusé d'avoir agressé sexuellement l'une des victimes de Jeffrey Epstein. Mais dans un commentaire, Stallman a remis en cause cet acte considéré comme viol en évoquant une sorte de consentement de la part de ladite victime. Ces propos ont indigné aussi bien le MIT que la communauté du logiciel libre, poussant RMS à démissionner de ses postes au sein du MIT et à la FSF.
Moins de deux ans plus tard, RMS signe son retour au sein de la Free Software Foundation (FSF), du moins en tant que membre du conseil d'administration, et peut-être avec l'intention de reprendre les rênes de l'organisation qu'il a créée. « J'ai une annonce à faire. Je suis à nouveau membre du conseil d'administration de la Free Software Foundation... Certains d'entre vous seront heureux de cela, et certains pourraient être déçus, mais qui sait ? En tout cas, c'est comme ça, et je n'ai pas l'intention de démissionner une deuxième fois », avait-il annoncé lors de l'événement virtuel LibrePlanet de la FSF.
Exprimant son indignation suite à la réintégration de Richard Stallman, l'Open Source Initiative (OSI) a annoncé qu'elle ne collaborera plus avec la Free Software Foundation si RMS ne démissionne pas à nouveau du conseil d'administration de l'organisation. « Pour réaliser pleinement la promesse de l'open source, l'OSI s'engage à construire un environnement inclusif où une communauté diverse de contributeurs se sent bien accueillie. Ceci n'est clairement pas possible si nous incluons ceux qui ont démontré un modèle de comportement incompatible avec ces objectifs... Nous pensons qu'il est inapproprié que Stallman occupe une quelconque position de leader dans la communauté du logiciel libre et open source... L'Open Source Initiative demande à la Free Software Foundation de tenir Stallman pour responsable de son comportement passé, de le retirer de la direction de l'organisation et de s'efforcer de réparer le tort qu'il a causé à tous ceux qu'il a exclus », peut-on lire dans l'annonce de l'OSI.
Des centaines de défenseurs du logiciel libre désavouent Richard Stallman
Presque au même moment où l'OSI dénonçait la réintégration de RMS, des centaines de défenseurs du logiciel libre ont écrit une lettre ouverte pour demander sa démission, et celle de tous les autres du conseil d'administration de la FSF pour leur passivité.
Parmi les signataires de la lettre, on retrouve des développeurs, contributeurs et hauts responsables d'organisations et projets du libre et de l'open source, y compris la GNOME Foundation, l'Open Source Initiative, la Software Freedom Conservancy, l'Apache Software Foundation, la Wikimedia Foundation, l'EFF, etc. On retrouve aussi des universitaires et même un ancien eurodéputé membre du Parti pirate suédois, en l'occurrence Amelia Andersdotter. Tous s'insurgent contre le comportement jugé indésirable de RMS, qui selon eux est une épine dans le pied de la communauté des logiciels libres et open source.
« Richard M. Stallman est depuis longtemps une force dangereuse dans la communauté du logiciel libre. Il s'est montré misogyne, capacitiste et transphobe, entre autres accusations graves d'irrégularité. Ces sortes de croyances n'ont pas leur place dans les communautés du logiciel libre, des droits numériques et de la technologie. Avec sa récente réintégration au conseil d'administration de la Free Software Foundation, nous demandons que l'ensemble du conseil d'administration de la FSF démissionne et que RMS soit démis de tous ses postes de responsabilité.
Nous [les signataires] croyons à la nécessité de l'autonomie numérique et au rôle puissant que joue la liberté des utilisateurs dans la protection de nos droits humains fondamentaux. Afin de réaliser la promesse de tout ce que la liberté logicielle rend possible, il doit y avoir un changement radical au sein de la communauté. Nous croyons en un présent et un avenir où la technologie affranchit – et non opprime – les gens. Nous savons que cela n'est possible que dans un monde où la technologie est conçue pour respecter nos droits à ses niveaux les plus fondamentaux. Bien que ces idées aient été vulgarisées sous une forme ou une autre par Richard M. Stallman, il ne parle pas pour nous. Nous ne tolérons pas ses actions et ses opinions. Nous ne reconnaissons pas son leadership ou le leadership de la Free Software Foundation tel qu'elle se présente aujourd'hui », peut-on lire dans la lettre ouverte. Avant de se montrer plus agressifs à l'égard du fondateur de la FSF.
« Il y a eu suffisamment de tolérance à l’égard des idées et du comportement répugnant de RMS. Nous ne pouvons pas continuer à laisser une personne ruiner le sens de notre travail. Nos communautés n'ont pas de place pour des gens comme Richard M. Stallman, et nous ne continuerons pas à souffrir de son comportement, en lui donnant un rôle de leadership, ou en considérant comme acceptables lui ainsi que son idéologie blessante et dangereuse. » Ils s'en prennent ensuite aux membres actuels du conseil d'administration de la FSF.
« Nous demandons la démission de l'ensemble du conseil d'administration de la Free Software Foundation. Ce sont des personnes qui ont soutenu et encouragé RMS pendant des années. Ils le démontrent à nouveau en lui permettant de rejoindre le conseil d'administration de la FSF. » Ils estiment qu'il est temps pour RMS de « rester en retrait par rapport aux logiciels libres, à l'éthique technologique, aux droits numériques et aux communautés technologiques », car il n'est pas le type de leader dont ils ont besoin que ce soit à la Free Software Foundation ou dans tout autre projet ou organisation qui incarnent le libre et l'open source. Et cela inclut le projet GNU. Les signataires de la lettre exigent en effet « que Richard M. Stallman soit démis de tous les postes de direction, y compris au sein du projet GNU. »
Comme si cela ne suffisait pas, ils appellent les sponsors et tous les membres de la communauté à boycotter la FSF et Richard Stallman. « Nous exhortons ceux qui sont en mesure de le faire à cesser de soutenir la Free Software Foundation. Refusez de contribuer à des projets liés à la FSF et à RMS. Ne parlez pas et n'assistez pas aux événements de la FSF, ou aux événements qui accueillent RMS et sa marque d'intolérance. Nous demandons aux contributeurs de projets de logiciels libres de prendre position contre le sectarisme et la haine dans leurs projets. »
Pour justifier ce rejet catégorique de RMS, une compilation de plusieurs incidents publics de son comportement a été faite. La compilation porte notamment sur la position du fondateur de la FSF sur des sujets tels que la pédophilie, les relations sexuelles avec mineurs, la pornographie des enfants, l'avortement, entre autres. Et dans ses prises de position, RMS semblait chaque fois aller à l'encontre de ce qui est accepté par la société. Doit-on pour cela l'éjecter de l'organisation et des projets qu'il a lui-même créés ?
Source : Lettre ouverte, Compilation d'incidents publics du comportement de RMS
Et vous ?
Le comportement de Richard Stallman est-il un frein à la promotion de valeurs du libre et de l'open source ?
Doit-on pour cela l'éjecter de l'organisation et des projets qu'il a lui-même créés ?
Qu'en est-il de Linus Torvalds ?
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Le , par Michael Guilloux
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