La municipalité de Munich opte déjà autant que possible sur les logiciels libres dans les marchés publics. C’est ce qui ressort d’un accord de coalition entre le Parti social démocrate d’Allemagne et les Verts. L’entente fait suite aux échéances locales du 15 mars dernier au terme desquels les partis ont été élus. Ses résolutions sont en vigueur jusqu’en 2026.
L’entente rappelle que « chaque fois que cela est techniquement et financièrement possible, la ville s’appuie sur des normes ouvertes et des logiciels libres afin d’éviter la dépendance prévisible aux fabricants. Cette considération est inscrite comme critère dans le cadre des appels d’offres. Toute déviation de ce principe doit être justifiée. » Sur cette lancée, le nouveau conseil municipal passe l’annonce selon laquelle il s’aligne sur l’initiative Public Money ? Public Code ! pilotée par la branche européenne de la Free Software Foundation (FSFE).
En substance, la nouvelle équipe dirigeante de la municipalité semble exprimer sa faveur au principe de logiciel libre d’abord pour ce qui est des acquisitions au sein des institutions sous son contrôle. De plus, le volet développement et publication active de logiciels libres par les agences gouvernementales n’est pas en reste. En effet, l’entente insiste sur la priorité à l’ouverture du code source sauf pour ce qui est de cas de figure spécifiques comme la nécessité de prendre en compte l’inclusion de données personnelles ou confidentielles. Ce positionnement n’est pas sans rappeler celui des Pays-Bas lancés sur une voie similaire. En fait, la municipalité de Munich vient allonger une liste (d’entités en faveur de l’initiative Public Money ? Public Code !) dans laquelle on retrouve le parti chrétien-démocrate allemand.
« La campagne Public Money ? Public Code ! campagne vise à établir le logiciel libre comme la norme pour les logiciels financés par les pouvoirs publics. Les administrations publiques qui suivent ce principe peuvent bénéficier d'une collaboration avec d'autres organismes publics, d'une indépendance vis-à-vis des fournisseurs uniques, d'économies d'impôts potentielles, d'une innovation accrue et d'une meilleure base pour la sécurité informatique. La Free Software Foundation Europe, plus de 180 organisations de la société civile et plus de 27 000 personnes ont signé la lettre ouverte. Nous ferons usage des signatures pour contacter les décideurs et les représentants politiques de toute l'Europe et les convaincre de faire du code public la norme », précise la FSF.
Ces développements portent les germes d’une possible relance du chantier LiMux dont l’annonce de l’abandon au profit de Windows 10 est tombée au cours du troisième trimestre de l’année 2017 dans le cadre d'un précédent accord de coalition entre le Parti social démocrate (SPD) et l'Union chrétienne sociale (CSU) . En 2003, Munich, troisième ville la plus importante d’Allemagne, dispose de plus de 16 000 PC utilisés par les employés de l’administration. La fin de la prise en charge de Windows NT est proche et celle de Windows XP suivra dans quelques années. La ville de Munich a besoin d’une alternative pour mettre fin aux migrations forcées imposées par les solutions propriétaires. Celle-ci permettra de : accéder à une large gamme d’applications ; faciliter l’interopérabilité avec les autres plateformes ; bénéficier d’un support constant ; réduire les coûts ; se libérer des « vendor lock-in ». C’est dans ce contexte qu’elle annonce le projet LiMux (une version personnalisée de Linux qui tournerait sur les ordinateurs des collaborateurs) en 2004.
En vertu des termes de l’accord de 2017, Munich devait entamer le déploiement d’un client Windows 10 à partir de 2020. Le coût de l’opération en cours est estimé à environ 86 millions d’euros. But de la manœuvre : remplacer complètement LiMux par Windows 10 à l’horizon 2023. Le nouvel accord de coalition entre entre le Parti social démocrate d’Allemagne et les Verts est un signal clair d’une possible nouvelle réorientation dans le sens inverse : de Windows à Linux. C’est le type de transition qui met des années à arriver à un terme, ce, même s’il faut relever que Munich ne devrait pas partir de zéro. En effet, les écosystèmes Linux et Windows continuent (en principe) de coexister sur les ordinateurs de la municipalité.
Les développements en cours peuvent traduire deux choses : primo, l’envie d’aller glaner d’importants pans de cette souveraineté numérique si chère dans le contexte mondial actuel ; secundo, des manœuvres destinées à faire bouger les lignes d’anciens contrats de manière à obtenir des rabais. Le nouveau conseil municipal n’a pas publié de feuille de route en lien avec ce nouvel accord de coalition.
Sources : accord de coalition, FSFE
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Voir aussi :
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Le , par Patrick Ruiz
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